Arnaud Franco est né aux États-Unis et a grandi dans divers pays à travers le monde, principalement sur le continent africain. Son père était Représentant Résident du Fonds Monétaire International (FMI) et, inspiré par sa passion pour les sciences économiques, Arnaud et son frère travaillent tous deux comme économistes à Montréal.
Je suis Montréalais depuis 2001, lorsque j’ai immigré pour poursuivre mes études en économie, d’abord à l’Université Concordia, et ensuite à l’Université de Montréal, où j’ai obtenu une maîtrise en Sciences Économiques avec une spécialisation en Organisation Industrielle.
Je suis maintenant directeur à Numera Analytics, un think tank économique basé à Montréal, qui se concentre spécifiquement sur le secteur des produits forestiers. Mon travail consiste à être une voix objective et fiable dans l’industrie mondiale des pâtes et papiers. J’apporte mon expertise à tous les niveaux, qu’ils touchent les producteurs, les consommateurs, le consommateur final, les chercheurs ou les analystes financiers. Je leur fournis des analyses et des conseils pour les aider à prendre des décisions commerciales intelligentes et bien informées.
Le secteur des produits forestiers est un marché mondial important, en particulier en ce qui concerne mon domaine d’expertise: la pâte à papier commerciale. La pâte commerciale est la matière première utilisée pour produire la majeure partie du papier dans le monde, et elle est un élément fondamental de la production de papier en général, papiers-mouchoirs et autres papiers tissu. La pâte commerciale est un produit de base, tout comme le cuivre, le minerai de fer, le pétrole, etc. Autant dans ma profession que dans la vie de tous les jours, il est essentiel de comprendre le contexte économique général, surtout après les chocs externes comme celui auquel nous nous adaptons tant bien que mal actuellement. Un exemple de choc récent: la ruée vers le papier de toilette lors de la première fermeture en mars 2020. Celle-ci fut un choc externe majeur pour la chaîne d’approvisionnement en papier hygiénique et autres papiers tissu, que les économistes ont contribué à amortir grâce à leurs prévisions et/ou leurs réactions.
La Covid a bouleversé les fondamentaux économiques mondiaux. La contraction de l’activité économique (décroissance) qui a pesé lourdement sur la demande, mais qui a également affecté les chaînes d’approvisionnement dans les premiers temps, a été la pire que le monde ait connue depuis l’époque de la Grande Dépression. Les fermetures d’usines et les mesures de maintien à domicile ont fait monter le chômage en flèche, avec un secteur des services ayant presque disparu dans une grande partie du monde. La plupart des grands gouvernements ont réagi rapidement avec des mesures de relance, qui ont permis de mettre de l’argent dans les poches des individus, de soutenir l’activité des consommateurs et de combler les manques en matière de besoins fondamentaux. Ces mesures agressives ont contribué à la reprise des économies mondiales et ce, mieux que ne le prévoyaient la plupart des prévisions (même les miennes). Et, malgré une deuxième vague forte, le sentiment général est relativement optimiste.
La reprise sera inégale, avec certains pays s’en tirant beaucoup mieux que d’autres. Celle-ci sera déterminée par un mélange de chance et/ou conditions économiques préexistantes, mais elle sera largement dictée par une combinaison de mesures de relance et de mesures de sécurité agressives.
Les pays qui disposent d’un secteur de services important, comme la France ou l’Italie, seront confrontés à des vents contraires éprouvants, car le tourisme mondial tarde à se redresser.
La première moitié de 2021 se présage difficile, et la seconde moitié repose en grande partie sur un déploiement réussi des vaccins afin que les gens puissent recommencer à se déplacer et à dépenser de l’argent.
L’économie canadienne s’est mieux comportée que la plupart des autres économies mondiales, ce qui explique le déclin d’environ 5% de l’activité économique en 2020. Le gouvernement a joué un rôle proactif pour soulager les personnes dont les emplois avaient été affectés par la pandémie, en augmentant la dette publique tant au niveau provincial que fédéral. Pour ce faire, il a eu recours à plusieurs mécanismes.
Le taux d’intérêt directeur a été ramené à 0,25%, et la Banque du Canada a fermement déclaré que celui-ci resterait bas tant que la reprise économique ne serait pas réellement engagée. Un taux d’intérêt directeur bas permet aux ménages d’emprunter à moindre coût pour financer des rénovations ou des achats importants.
Aujourd’hui, les bilans des ménages sont en relativement bonne santé, car les taux d’épargne ont augmenté au cours de la pandémie, notamment en raison des interdictions de voyager qui ont et continuent de maintenir les dépenses au sein de l’économie canadienne. Et, bien que cela fonctionne bien à court terme, pour maintenir les taux d’intérêt à un niveau bas à long terme, la Banque du Canada a également eu recours à l’assouplissement quantitatif (QE). L’assouplissement quantitatif signifie que la banque centrale se lance dans le rachat massif d’obligations d’État, généralement détenues par des institutions financières, ce qui fait monter leur prix et maintient les rendements obligataires à un niveau bas. Si les rendements, les taux d’intérêt, des obligations du gouvernement du Canada restent bas, cela encourage le secteur financier à proposer des taux plus bas pour les prêts à long terme. Ceci représente une aubaine pour les ménages, en particulier ceux qui cherchent à acheter une propriété.
Toutefois, l’une des conséquences de l’assouplissement quantitatif peut être l’inflation, alors que le mandat de la Banque du Canada reste de maintenir la stabilité des prix. Heureusement, l’indice des prix à la consommation (IPC) est inférieur au taux cible de 2%, ce qui fait du QE un outil efficace pour lutter sur deux fronts. Certains affirment que le taux du QE est actuellement trop élevé. À titre de comparaison, la Banque du Canada poursuit le QE à un taux six fois plus élevé que celui des États-Unis.
Les critiques affirment que le QE aggrave les inégalités économiques en augmentant les prix des actifs que seules certaines catégories de salaires peuvent se permettre. L’immobilier en est un bon exemple, et restant sur ce même sujet, le QE ne parvient pas non plus à aider les ménages à faibles revenus, qui sont plus susceptibles de louer que d’acheter, et qui n’ont pas la capacité de financer des dettes à court terme.
Au Canada, les prix de l’immobilier sont en forte hausse. Les prix ont augmenté de 8,3 % au troisième trimestre de 2020.
Le marché immobilier canadien a dépassé celui de tous les autres pays du G7 depuis la Grande Récession de 2008.
Cette tendance devrait se poursuivre, résultant possiblement en un marché national gonflé. Cette situation est particulièrement vraie à Montréal, où l’inventaire de propriétés disponibles est faible comparativement à une demande beaucoup plus importante. Autre fait intéressant: la pandémie a poussé ceux qui pouvaient travailler à domicile à le faire, et il est probable qu’il en résultera une augmentation permanente des bureaux à domicile, même suite à la pandémie. Cela a contribué à la forte augmentation des prix des logements dans les secteurs environnants de la ville, alors que les télétravailleurs recherchent de plus en plus des espaces plus grands et plus calmes.
Une correction importante des prix de l’immobilier est donc peu probable pour l’instant, et ce, même après que les taux d’intérêt recommenceront à augmenter. Les taux d’intérêt sont en baisse sur le long terme depuis les années 80, et rien n’indique que cela ne restera pas ainsi.
La Banque du Canada a quant à elle clairement indiqué qu’elle prévoit poursuivre sa politique d’assouplissement quantitatif, comme l’ont fait les États-Unis et la zone euro, ce qui signifie qu’elle ne pense pas que l’inflation sera un problème à court terme. Les taux à long terme resteront donc bas, ce qui devrait encourager de plus en plus de nouveaux acheteurs à se présenter sur un marché de l’immobilier déjà en pénurie;
Je m’attends donc à ce que les prix de l’immobilier restent élevés dans un avenir prévisible.